Qu'est-ce que l'hypersexualité ?
12 oct. 2017
Quel parcours peut-on trouver derrière L'hypersexualité ? Comment se traduit ce comportement ? Ce type de sexualité permet-il de retrouver le calme intérieur ? Peut-il il y avoir un facteur environnemental, agissant comme un stimulant ?...
Quel parcours peut-on trouver derrière L'hypersexualité ?
Après avoir écarté les causes biologiques (hormonal « excès de testostérone », bipolarité, etc), il est possible qu’elles soient issues d’un parcours personnel tu et/ou occulté. Derrière cette information se cache une histoire, celle d’un individu quel que soit son sexe. Une fois cette évidence comprise, c’est une personne, avec son ressenti, son vécu au quotidien à accueillir. Cette approche est essentielle. C’est un parcours complexe et stressant qu’il faut comprendre. Donner un nom à sa problématique, c’est pouvoir relier des points entre eux, contextuellement et dans l’absence totale de jugement. En effet, l’hypersexualité n’est pas ce qui définit l’existence propre d’une personne. Elle ne le retranche pas dans cette dénomination d’hypersexuel/le à jamais.
Comment se traduit ce comportement ?
Il s’exprime par une libido augmentée, mais surtout par des scénographies obsessionnelles, toutes tournées vers la sexualité. L'hypersexuel/le est dans une recherche incessante de l'acte et du plaisir sexuel. Il ne s'agit donc pas uniquement du nombre et des fréquences de ces rapports, mais de l'importance que prend la sexualité dans la vie quotidienne. Ces troubles peuvent occulter une souffrance psychologique, une dépression, et associer un stress intense d’amplitude variable. L'hypersexuel vit dans une envie quasi permanente de plaisir sexuel et son quotidien est axé sur cette recherche du plaisir.
Ce type de sexualité permet-il de retrouver le calme intérieur ?
Non, car cette sexualité compulsive et nourrie engendre un sentiment d'insatisfaction en générant une suite d’expériences. La personne a besoin de multiplier le plaisir sexuel sans vraiment être satisfaite. En effet, tout s'organise autour de l'acte sexuel, virtuel, ou réel dans toute la panoplie des possibles. Ce peut-être une masturbation compulsive : de 7 à 15 fois par jour dans plus de la moitié des cas. Une omniprésence des fantasmes sexuels (deux tiers des cas, selon certaines études), le voyeurisme (deux tiers des cas), le recours au sexe payant (prostituées). Dans certain cas cette sexualité est vécue par téléphone avec le recours à l’auto plaisir.
Cette recherche est chronophage et l’extérieur ignore souvent la complexité de ce cheminement et de ces conséquences. Pourtant, la personne peut avoir eu un parcours de violences sexuelles, une suite de traumatismes qu’elle vit comme une négation de son corps et de ses sentiments. Il peut s’agir d’un avilissement sous contrainte dans son passé, une perversion dont elle n’a pas conscience et dont elle la victime. Elle peut résulter du déplacement d’une addiction. L’arrêt d’une substance peut entraîner un report vers autre chose. J’y reviendrais. ?
Peut-il il y avoir un facteur environnemental, agissant comme un stimulant ?
La pornographie en fait partie. Mais le sexe passe par de nombreux supports. L’accès à des sources de stimulation est varié et arrive aujourd’hui en quelques clics dans le confort de son appartement. Ce sont ces images, des clichés vecteurs de fantasmes qui élaborent et nourrissent les pulsions. Plus elles sont sollicitées et plus le désir augmente. Il faut à son paroxysme relâcher la pression et ainsi de suite. Bien que ces scénographies ne soient pas des substances, elles peuvent provoquer une dépendance par ce qu’elles induisent.
Peut-il s’agir d’atténuer des tensions psychiques et de quelle nature ?
Oui bien entendu, si l’on admet qu’elles peuvent être un « tampon » construit par la personne pour pallier à un stress « ancien ou récent ». Je m’explique. Chacun peut mettre en place et paradoxalement « contre lui » des contournements face à un évènement difficilement gérable, voire traumatisant. Ces mécanismes sont à l’insu « de soi-même », et varient d’une histoire à l’autre. Il est possible que des pulsions occultent certains clichés de la vie passée. Ils peuvent être enfermés dans la mémoire et sembler totalement absents du parcours au présent. Mais l’histoire individuelle est enregistrée par le cerveau depuis le jour de sa naissance. Mais plus le temps passe et plus l’origine d’un stress devient confuse. Néanmoins les tensions générées par son « origine », elles sont bien présentes, et vécues selon la construction psychique propre.
Lors d’une de mes consultations liées à une hypersexualité, le corps du patient contextuellement, semblait estimé par lui comme sans valeur. Il se vivait comme un objet en se dissociant avec un ou une partenaire, voire plus dans les scénographies de rapports sexuels de groupes. C’est cette dissociation qu’il lui a fallu envisager et au bon moment et comprendre ses mécanismes au présent. Voici quelques phrases « reflet à l’instant T » de sa perception.
(J’existe peut-être autrement, mais… Ça me prend du temps d’organiser mes repos pour B… pourquoi je me sens vide et coupable après… L’idée d’être un instrument me plaît presque autant que de tout organiser pour… sans protection c’est encore plus fort… Le sexe m’aide dans mon existence parce que sans lui… Avec moins de sexe ? J’ai cet appétit alors je ne vois pas comment… C’est peut-être, comme disparaître dans le plaisir… Je n’ai jamais vraiment existé autrement… Parfois au calme, mes pensées me stress… Les risques que je prends me font peur, mais l’excitation est si puissante… J’aimerais en parler, mais…).
Il m’a semblé que certaines phrases se référaient à des vécus résultant de son passé. Ce temps libre entre deux actes « décrit comme facteur de stress » pouvait être un point de départ à l’exploration. Quels souvenirs « le calme ramenait-il à la surface » ? Mais aussi pourquoi vouloir disparaître dans le plaisir, etc… Protéger dans la séance il pouvait en parler. L’écoute était parfois entrecoupée de calme, d’hésitations. Il est important de vivre le protocole incluant ces phases sans intrusion de ma part.
Comment la sophrologie a-t-elle donné un premier outil pour approcher cette hyper sexualité ?
Son corps et lui ne font qu’un et l’histoire de son existence est liée à celui-ci. Il peut s’écouter et être écouté, s’il s’autorise du temps. J’ai formulé l’idée que « ce parcours » était une expérience à intégrer dans son existence, qu’il n’actait en rien un mode de vie définitif. Se replacer dans ses sensations durant nos séances lui a permis de recréer un nouveau lien vers son corps, ses ressentis qui sont toutes les vibrations du vivant. Si les premières pensées objectaient la possibilité d’une avancée dans sa vie, le temps à fait son œuvre, à son rythme. La première étape fut pour lui de se pardonner, d’accepter son histoire pour atteindre la résilience. Nous poursuivons aujourd’hui l’ancrage en écoutant les entraves de moins en moins présentes dans son corps. Nous travaillons dans le respect des mots et des images parfois complexes, en y associant son corps. Pourquoi ?
Parfois le patient parlait de lui avec mépris tout en jouant les indifférents. C’est montrer à demi-mot qu’il y avait autre une vérité importante. L’accueil respectueux de ce qu’il dévoila à désamorcer une tentative subconsciente de sa part que je confirme, valide la médiocrité, approuvant ainsi l’idée qu’il avait de lui. C’est ce mépris qui est le fil d’Ariane, qui le conduira à l’épicentre, au point zéro. Sembler être indifférent est une protection contre la douleur. Cette phase à son importance. Elle va révéler des pistes, des lieux, des époques. Attention, cela ne veut pas dire que chaque personne est identique.
Quel rapport au corps va permettre la sophrologie pour se retrouver ?
C’est la réappropriation de son schéma corporel qui est à revisiter. Cet état complexe va demander de s’autoriser progressivement, et par le travail thérapeutique d’atteindre un rééquilibrage global par étapes. C’est vivre la sexualité autrement. N’oublions pas que la sexualité fait partie de la vie, mais qu’a contrario pour ce patient l’hypersexualité résultait de tensions in vivo et in situ. Tout est possible par le travail dans le contexte rassurant du cabinet. Il est certain qu’au début du moins, les nouvelles réactions peuvent être troublantes et elles l’ont été dans son accueil intrinsèque. Mais toutes les transformations découlant des remaniements sont autant de redécouvertes. Cet état est transitoire. En effet, J’ai pris tout le temps nécessaire pour l’accompagner en donnant des outils adaptés et libres d’utilisation. Il ne s’agit pas de le rendre dépendant à la thérapie, mais d’être à l’écoute pour sa transition.
Découvrez dans un prochain article « pour vivre heureux vivons cachés » la complexité de l’acceptation de son orientation sexuelle.
Article écrit par Thierry MIGNON